Tektronix, Dolby et Snell Group se sont regroupés pour proposer aux professionnels une journée de séminaire sur le thème des évolutions technologiques en cours, comme le loudness, l’IMS ou la fibre optique. D’autres évolutions semblent imminentes telle l’Ultra HD. L’occasion de faire le point sur ce sujet et le 4K.
Christophe Nelson, formateur à Ina-Expert, a fait un point d’étape fort utile sur l’après HD, la ultra-haute définition (UHD). Dans le monde du cinéma, le 4K (4096 x 2106 pixels) existe depuis les années 1996. Mais n’étant pas 16/9, il ne peut être retenu comme standard pour la TV. De son côté, la NHK (unique groupe audiovisuel public japonais) expérimente depuis 2003 ce qu’elle a d’abord appelé l’ultra HD (7680 x 4320 pixels), puis la SHV, Super Hi Vision.
Plus récemment, différents constructeurs ont entamé des expérimentations techniques et commerciales en doublant la taille de la HD pour obtenir une image de 3840 x 2160. On parle, selon les cas, de 4K ou de Quad HDTV. L’ITU-R (International Télécommunication Union, secteur de la radiocommunication) a statué en août 2012 : la résolution de 3840 x 2160 s’appellera UHD-1, tandis que le 7680 x 4320 devient l’UHD-2. L’UHD-2 n’est peut-être pas pour demain, le débit en 50P étant 32 fois celui de l’actuelle HD ! Notons au passage que l’entrelacé disparaîtra avec le 1080i de la HD, toutes les normes futures ne prennent logiquement en compte que la structure progressive de l’image. Malheureusement, 4K cinéma et UHD-1 ne seront pas harmonisés autour d’une même taille d’écran, ce qui aurait facilité l’industrialisation de matériels communs, telles les dalles pour les écrans.
Le CEA (Consumer Eectronic Association) a, en octobre dernier, validé la dénomination UHD pour les téléviseurs de définition d’image 3840×2160. « On pourrait donc se diriger vers un nouveau standard, commente Christophe Nelson. Cependant, tous les fabricants ne sont pas encore prêts à s’y conformer, à l’image de Sony qui a annoncé qu’il continuerait d’utiliser l’appellation 4K »
Quels sont les arguments en faveur d’une évolution vers de plus grandes définitions d’image ? Avec la HD, la télévision a franchi un bon pas dans la quête de la qualité d’image. Est-ce suffisant ? Notre oeil ne discerne plus les détails écartés de moins d’1/60°. Cela signifie qu’à une distance de trois fois la hauteur d’un écran – distance conseillée de visionnement d’un écran HD – , il faudrait environ 900 lignes progressives pour satisfaire la résolution de l’oeil. Or il n’y en a que 540 par trame en diffusion TV entrelacée actuelle. Par contre, le passage en HD progressive 1080/50P satisfera cette condition.
Par ailleurs, la fréquence image joue évidemment sur la qualité de visionnement. Plus la définition est grande, plus les saccades se voient dans les mouvements. En fait, des études de la BBC montrent qu’il faudrait monter à plus de 100 i/s en UHD. Verrons-nous bientôt une unification de la télévision sur une fréquence mondiale de 120 Hz ?
C’est là que le bât blesse pour l’UHD TV : les caméras permettant d’enregistrer jusqu’à 120 i/s existent, les écrans permettant de la diffuser commencent à arriver ; mais, entre les deux, les infrastructures au-dessus de 60 i/s n’existent ni pour la production, ni pour la distribution. Il semble donc que le High Frame Rate soit encore un lointain projet, et que dans les années à venir on doive se contenter de 50 ou 60 i/s.
Alors que le passage de la SD à la HD ne concernait que la résolution spatiale, pour l’UHD, d’autres paramètres comme le codage couleur et l’espace colorimétrique seront améliorés. Pour le codage couleur, les travaux de l’ITU-R font apparaître que le matriçage, tel qu’il est effectué actuellement, n’est pas parfait.
Ce passage des trois signaux RV et B aux composantes Y, CR, CB est calculé sur les primaires RVB pré-corrigés en gamma. Or, cela débouche sur une luminance (Y) non constante, car elle varie légèrement selon le sous-échantillonnage choisi (4.4.4, 4.2.2 ou 4.2.0). Un nouveau schéma de matriçage est envisagé pour aboutir à une luminance constante, quelle que soit l’importance de la réduction de débit appliquée (que ce soit en production ou en diffusion). Mais la compression sera plus indispensable que jamais. En UHD-1, le débit vidéo non compressée est de 8294 mb/s, soit 8 fois la HD actuelle !
Le codec h.265 appelé en renfort
Parmi les obstacles actuels à l’UHD, on trouve également la diffusion. Les progrès du côté des codecs permettent d’espérer des débits moindres à qualité constante : le HEVC (High Efficiency Video Coding) ou H.265 dont la première spécification doit être finalisée pour janvier 2013 promet de diviser le débit par deux pour une même qualité, et de supporter des résolutions jusqu’à 8K (8192×4320).
Au côté de cette amélioration intrinsèque des algorithmes de compression, deux autres paramètres concourent à modérer l’augmentation des débits liées au plus grand nombre de pixels. Une image en balayage progressif se compresse mieux que la même en entrelacé. Par ailleurs, l’augmentation du débit n’est pas strictement proportionnelle à l’augmentation de la définition spatiale. En effet, avec une image de 3840×2160 px, la corrélation spatiale à l’intérieur d’un bloc est meilleure qu’en 1920×1080. En d’autres mots, le même bloc de DCT de 8×8 pixels contiendra des pixels statistiquement plus similaires en UHD qu’en HD, donc la compression sera plus efficace à qualité égale.
Vers un long développement
Les caméras 4K commencent à arriver sur le marché : citons les Sony F65, F5 et F55, la Red Epic, ou encore la JVC GY-HMQ10 qui présente l’originalité d’enregistrer des images full HD sur quatre cartes à mémoire flash (soit 1/4 d’image UHD par carte). En dehors de la JVC, la plupart de ces caméras sont orientées cinéma et non UHD-1.
Du côté des écrans, Toshiba, LG, Samsung, Panasonic et Sony ont tous annoncé l’arrivée d’écrans 4K en 2013. Les prix varieraient entre 10000 et 30000 USD, avec des tailles autour de 84 pouces. En réalité, la plupart de ces écrans seront limité à 30 i/s par leur connectique HDMI. Pour le 50 ou le 60 i/s, il faudra attendre qu’ils soient équipés en HDMI 2.0, dont la sortie, à l’heure où nous écrivons ces lignes, est annoncée comme imminente.
On parle donc beaucoup de 4K et d’UHD, mais on est encore loin. L’attrait du public pour de telles qualités d’image n’est pas encore prouvé. La taille de l’écran – forcément très grand – risque de limiter la généralisation de l’UHD. L’UHD-1 et plus encore l’UHD-2 trouveront des applications en matière d’affichage très grand écran dans les satdes, lieux publics et parcs à thème.
Néanmoins, on estime que l’UHD pourrait apporter une nouvelle qualité de ressenti pour certains types de programmes très immersifs. Elle est d’ailleurs l’alliée du relief, puisqu’elle apporte une meilleure définition, avec ou sans lunettes. « On ne peut pas prédire à l’heure actuelle si elle se généralisera à tous les programmes, mais il semble bien qu’elle soit amenée à se développer, conclut Christophe Nelson. Ce sera cependant un développement long, car toute la chaîne de diffusion – et de production – est à revoir, et cela nécessite beaucoup d’expérimentations et d’investissements.«
Pour plus d’informations, se reporter à la recommandation de l’ITU-R : ITU-R BT.2020 sur le site de l’ITU.
Source : SonoVision